Eld1-1 - Pile au Bichromate

Fonction

Générateur électrochimique de force électromotrice égale à 2 volts.

Description

L'électrolyte, solution aqueuse de « bichromate de potassium » (K2Cr2O7) et d'acide sulfurique (H2SO4), est contenu dans une bouteille de verre. Un bouchon isolant porte les bornes de cuivre, pôles de la pile. Deux lames bornes de charbon de cornue, solidaires du bouchon, reliées à l'une des bornes, plongent dans l'électrolyte lorsque le bouchon est en place. Elles constituent la borne + de la pile. La borne négative est constituée par une plaque de zinc qui peut être fixée sur une tige traversant le bouchon. En relevant la tige on peut retirer la plaque de zinc de l'électrolyte pour lui éviter d'être attaquée lorsque la pile n'est pas utilisée. Inversement la pile est mise en ordre de marche en abaissant la tige, donc par immersion de la lame de zinc entre les lames de charbon.


La pile pourrait fonctionner théoriquement sans bichromate. La réaction électrochimique serait :

sur le graphite (+)

2H++2e- → H2

sur le zinc (-)

Zn → Zn2++2e-

soit globalement

Zn+2H+ → Zn2++H2

L'hydrogène produit à la surface des électrodes de graphite « polarise la pile », c'est-à-dire modifie sa structure et accroît considérablement sa résistance entraînant une forte chute de l'intensité du courant, donc de l'énergie électrique produite. Pour éviter cet inconvénient on utilise un « dépolarisant », un oxydant qui peut être du bioxyde de manganèse dans le cas de la pile Leclanché ou du bichromate de potassium pour la pile décrite ci-dessus. La réaction chimique mise en jeu est alors la suivante :

sur le graphite (+)

Cr2O72-+14H++6e- → 2Cr3++7H2O

sur l'électrode de zinc (-)

Zn → Zn2++2e-

soit globalement

Cr2O72-+14H++3Zn → 2Cr3++7H2O+3Zn2+

Il n'y a plus cette fois de produit gazeux polarisant. La réaction peut se produire utilement par échanges d'électrons d'une électrode à l'autre à travers le circuit d'utilisation. Mais les deux demi-réactions ci-dessus peuvent se produire également, toutes les deux, au niveau de l'électrode de zinc par échange direct d'électrons ; l'électrode de zinc est alors rongée inutilement, sans production d'énergie électrique, c'est pourquoi il faut la retirer. Il est superflu d'ajouter que cette pile n'est plus utilisée.

Remarque : Le gaz de ville était produit autrefois dans des « usines à gaz » par distillation « en vase clos » de la houille (charbon) dans des cornues. Les parois de celles-ci se recouvraient de carbone dur (semblable au graphite) appelé « charbon de cornue » dont on faisait des électrodes.

Histoire

La pile au bichromate est due à Poggendorff, physicien allemand (1842). La première pile fut inventée par Alexandre Volta (1745-1827) en 1800 ; c’était un empilement alterné de rondelles de cuivre (+) et de zinc (-) séparées par des rondelles de drap imprégnées d’eau acidulée. La pile à auges de William Cruikshank, les piles de William Wollaston, de Münk sont de même type (couple Cu-Zn).

Antoine César Becquerel (1788-1878), polytechnicien, grand-père de Jean Becquerel découvreur de la radioactivité, a découvert la cause (polarisation) du mauvais fonctionnement de ces piles. Un oxydant peut servir de « dépolarisant ».

Yohann Christian Poggendorff (1796-1877) utilise en 1842 le bichromate de potassium comme dépolarisant et met au point la pile que décrit cette notice. Poggendorff est connu pour sa mesure des petits angles par l’emploi d’un petit miroir concave (amplification par levier optique), méthode employée pour les galvanomètres, magnétomètres, balances... il est aussi l’auteur de la méthode d’opposition pour la mesure des forces électromotrices ; il étudia la résistance des matériaux, essaya une pile thermoélectrique fer-maillechort...

En 1877, l’ingénieur français Georges Leclanché (1839-1882) réalise la pile utilisant le couple carbone (+) /zinc (-) avec le chlorure d’ammonium comme électrolyte et le bioxyde de manganèse comme dépolarisant. Perfectionnée par Charles Fery, cette pile devient une « pile sèche ».

Une autre solution au problème de la polarisation est la pile impolarisable, réversible, à deux liquides. C’est ce principe que le physicien anglais John-Frédéric Daniell (1790-1845) met en œuvre en 1836 dans la pile qui porte son nom : électrode Cu/solution Cu2+/solution Zn2+/électrode Zn. Daniell est aussi l’inventeur de l’hygromètre à condensation (Flu4-2). La pile Bunsen (1842) est aussi une pile à deux liquides (Zn/H2SO4/HNO3/C).